voilà près de trois mois que le coronavirus fait l’actualité, dans la presse, à la télévision, à la radio ( aux dépens d’une autre actualité , tout aussi, voire plus importante pour le présent et l’avenir : vois l’article de BHL dans Le Point du 30 avril). Il y a de bonnes raisons pour qu’il en soit ainsi, parce que la vie de chacun est très affectée par cette pandémie, qu’il est question de vie et de mort et de toutes sortes de conséquences pour la vie quotidienne et le futur proche ( et sans aucun doute lointain). Mais, bien sûr, on aurait tort d’oublier que les politiques restent des politiques, obsédés par le pouvoir et la puissance, que la vie des citoyens- à titre individuelle- n’est pas au centre de leur préoccupation, contrairement à ce que l’on pourrait croire. On y reviendra.
Pour le cosmopolite que je suis, la première chose qu’il me semble nécessaire de souligner est que, pour celles et ceux qui ne l’auraient toujours pas compris, la pandémie montre à quel point nous dépendons toutes et tous les uns des autres, à tous les niveaux , des familles aux Etats. La pandémie a fonctionné comme une radiographie du monde : ce qui était caché aux yeux de la plupart des gens – dont les miens- les interdépendances-, est apparu clairement.
La deuxième leçon que j’en tire est que, même dans des situations qui ramènent les êtres humains à leur condition de simples mortels- et qui devraient les amener à u ne solidarité sans conditions et sans arrière-pensées, il n’en est rien. La solidarité se manifeste au niveau de la population ( sans oublier néanmoins que pour certains le malheur est toujours l’occasion de faire de l’argent) , mais au niveau de la politique-nationale et internationale- le compte n’y est pas. (l’article de BHL le montre bien) Les Etats , même dits démocratiques, ont une obsession du pouvoir et de la puissance, qui les détourne de trop s’attarder sur les malheurs des citoyens ( le peuple , la nation sont des abstractions ; le peuple et la nation font oublier les citoyens , qui sont seuls réels)
D’où la troisième leçon: c’est que les changements ne proviendront pas des politiques « professionnels » mais des citoyens , si lesdits citoyens n’aspirent pas uniquement à retrouver le monde d’avant et soient prêts à consacrer un peu plus de leur temps et de leur intérêt au « bien commun ».La solidarité fait partie de la citoyenneté , elle n’est pas simplement une affaire privée, une affaire de bons sentiments. Elle exige d’être pensée pour devenir une idée efficace sur le long terme.
Et c’est bien là le vrai problème: si nous avions à définir le combat qu’il faut mener , nous dirions que c’est celui de la citoyenneté contre les effets négatifs de la mondialisation , d’un monde que le capitalisme et la finance ont construit au profit de quelques-uns.
On voit réapparaître – de manière quasi obsessionnelle- l’idée de souveraineté comme LE remède à l’interdépendance , c’est-à-dire pour chacun , la dépendance. La dépendance est dans la nature des choses. A moins de pouvoir tout produire par soi-même à partir de soi-même- situation humainement impossible- il est impossible d’être souverain. la dépendance est un fait , elle n’est pas un mal en soi. Il faut évidemment qu’elle ne soit pas l’occasion pour certains d’exploiter les faiblesse des autres. L’idée de coopération est , me semble-t-il, la meilleure idée qui soit : travailler ensemble au bien commun. Mais il ne faut pas attendre de la ccopération entre Etats ce qu’elle ne peut donner. La coopération doit être d’abord celle des citoyennes/citoyens.
Ce que la pandémie nous invite à penser c’est précisément cette coopération citoyenne. Aujourd’hui on apporte son soutien aux soignants. mais hier que faisait-on? Et demain que fera-t-on? Pourtant , depuis des mois, des années, le personnel hospitalier ne cessait de revendiquer d’autres conditions de travail, plus de moyens. Après les attentats terroristes on embrasse les forces de l’ordre et après?
Il convient que chacun réfléchisse à sa propre vie , la juge et prenne acte de ce qu’il n’a jamais fait et qu’il conviendrait qu’il fasse. Une citoyenneté active conduit nécessairement à une réflexion sur sa propre vie et, sans aucun doute , à une réorganisation de cette vie , pour que le souci du bien commun y prenne la place qui devrait lui revenir.
Toutes les excellentes idées que l’on trouve au fil des articles de journaux n’auront quelques effets , que si les citoyens les font leurs. Le commun n’existe que dans et par les actions en commun.
