Revenir à soi 3

Revenir à soi 3

Suis-je content d’être né ?

Etre né  ne signifie pas simplement exister  ou vivre. Etre né c’est  ne pas avoir choisi de vivre . Et comme on naît tel ou tel,  à tel ou tel endroit, à tel ou tel moment, être né c’est ne pas avoir choisi de naître fille ou garçon ( voire de sexe indéterminé), ne pas avoir choisi l’endroit, ne pas avoir choisi le moment, eu réalité  n’avoir rien choisi  . C’est ce que les philosophes appellent contingence  .

L’alternative au fait d’être né serait d’avoir pu choisir  ma naissance  , l’ensemble de mes déterminations, de m’être auto-engendré. Ce qui supposerait que je fusse avant de venir au monde sous la forme d’une puissance absolue , c’est-à-dire infinie et indéfinie .

Il n’en est rien. Pourtant je n’ai cessé  quotidiennement, dans des choix qui n’étaient pas d’une importante existentielle ( choisir une pâtisserie, la couleur d’une chemise ou d’un pantalon..) comme dans des choix beaucoup plus importants, de ceux qui engagent la vie dans des voies qui la marqueront à jamais ( se marier, choisir telle profession, choisir d’avoir un enfant..) de faire l’expérience de ma liberté. Non pas de ce pouvoir absolu dont parle certains philosophes  : mes choix se sont souvent faits dans l’inquiétude , voire l’angoisse, ont convoqué la réflexion pour tenter de trouver une décision valable, satisfaisante. Ils ont révélé un être divisé. Le passé était convoqué pour déterminer le futur.. mais la liberté était bien réelle.

Elle l’a toujours été , même dans mes moments de désespoir , qui ne m’ont pas conduit à mettre un terme à ma vie ( il n’y eut que deux tentatives de faux suicide, dont je me réjouis aujourd’hui qu’ils n’aient pas réussi). J’ai toujours eu le sentiment que tout n’était pas joué, que les jeux n’étaient pas faits , qu’autre chose était possible, qu’il ne fallait pas désespérer ( cette formule que j’utilise si fréquemment!), qu’il y avait un espoir de voir les choses s’améliorer, qu’il était possible de les améliorer..

J’ai fait l’expérience qu’être né n’était pas la négation de la liberté ,, que ce que l’on appelle « la naissance » n’était qu’un moment d’une vie qui avait un avant et un après , et que mes choix étaient une nouvelle naissance.

Alors suis-je content d’être né? La réponse  se trouve dans ma vie : je suis toujours vivant et l’expérience de ma liberté et donc du monde m’a prouvé que la vie était désirable  et que le monde pouvait l’être.

J’en suis arrivé à cette idée que la question de l’éthique était : comment faire que le monde soit désirable, que notre présence au monde le soit?